Les maires sont inquiets. Les maires sont lassés et maintenant menacés. Dans ce contexte très compliqué, dans la dernière ligne droite avant les municipales, un homme s’emploie à les rencontrer. Jean-Marie Mizzon, Sénateur et président de l’association des maires ruraux intervient sur tous les terrains.

La réforme de la fiscalité locale engagée par le gouvernement affole les élus municipaux et en particulier les Maires, qui y voient à très court terme un effet ciseaux empêchant de tenir l’équation des finances de la villes et villages. Ils sont d’autant plus sensibles qu’ils savent désormais à travers leurs échanges avec le Sénateur de Moselle Mizzon, qu’il n’y aura pas de loi dédiée pour fixer les futures relations financières, mais qu’il appartiendra aux lois de finances successives d’orchestrer la nouvelle donne. « Nous regardons ensemble les différents scénarii possibles, mais il n’en  demeure pas moins que lorsque l’Etat décide de supprimer la taxe d’habitation c’est une attitude très jacobine à travers laquelle le grand perdant risque fort d’être le conseil départemental » explique le Sénateur. Car selon les approches développées par le pouvoir, les communes auraient en compensation de la perte sèche de la taxe d’habitation, la part du Département de l’impôt sur le foncier bâti… Au plan national, la suppression de la TH représente 14 milliards d’euros. La redistribution des moyens entre les différentes collectivités s’effectuerait par l’attribution du foncier bâti pour les communes et intercommunalités, à laquelle s’ajouterait une dotation d’Etat pour boucler l’équation en faveur des communes et une part de TVA pour épauler les EPCI. Malgré ces pistes présentées, les maires ne perçoivent pas encore la manière, dont ils vont pouvoir boucler leurs budgets dans les années à venir.

Menaces et… voies de faits

L’argent étant certes le nerf de la guerre, les nerfs de nos élus n’ont pas besoin de ces incertitudes de moyens pour être à vif. La récente mort d’un maire du Var écrasé par une camionnette surprise en train de déposer des déchets dans la nature est venue au cœur de l’été raviver un plaie purulente. Au fil des mois écoulés, les maires sont de plus en plus pris à partie, insultés, menacés, quand ils ne subissent pas des voies de faits. Du coup, la marmite bouillonne très sérieusement et il ne faut pas s’étonner de voir les menaces de ne pas se représenter en mars 2020 poindre. Le pouvoir actuel, qui ne dispose déjà que d’une très faible représentation territoriale, ne doit non seulement pas se réjouir de cet état d’esprit. Il a, au contraire, tout à en redouter. D’autant que l’affaire du droit à la différenciation, qui intéresse au premier chef les communes, se trouve gelé depuis que le processus de refonte de la Constitution est lui même en panne depuis 2018. De quoi s’agit-il ?  Le gouvernement veut permettre aux collectivités territoriales d’adapter le droit à leur situation et d’exercer des compétences différenciées. Pour cela, l’article 72 de la Constitution sera modifié. La question étant de savoir quand, car le droit à l’adaptation, donnant le moyen aux collectivités de déroger aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent leurs compétences serait une bouffée d’oxygène en ces temps d’incertitude financière. Il faudra toutefois que le texte en question prévoie qu’une collectivité pourra demander d’adapter le droit à sa situation et à ses particularités. De quoi générer une acceptation de la diversité des territoires. De ce côté également l’horizon semble pour l’instant bouché. « Déjà avec les premières mesures de suppression de la TH, au moins 10 000 communes sont perdantes en raison du gel calé à 2017. En 2018, 8 000 communes ont augmenté leurs taux de TH, mais le compte n’y est pas. Car en raison même du gel évoqué, l’Etat ne compense qu’à hauteur de 1000, quand les communes affichent avoir besoin de 1050. La dérive va se poursuivre et dans le même temps les contribuables du haut de la strate vont continuer de régler la taxe d’habitation » explique Jean-Marie Mizzon, qui mesure de façon palpable la mauvaise humeur, voire la colère des maires qui semblent ne rien voir venir d’aucun horizon.

Un étage stratégique, un étage du quotidien

Le terrain c’est justement l’espace d’expression du Sénateur qui trace de façon profonde son sillon. D’abord au titre de ce mandat national, et de façon plus proche encore comme président de l’association des maires ruraux. Lui même ancien maire de Basse-Ham mesure à quel point ces sujets sont douloureux. Or donc sur le terrain, ce qu’enregistre Jean-Marie Mizzon ce sont « des demandes pressantes pour la réalisation de l’A-31 bis afin de fluidifier un peu les mouvements vers le Grand-duché, mais également de façon plus ciblée, la demande entêtante de la commune de Failly, qui réclame à la réalisation d’un mur anti-bruit pour se prémunir de la rumeur permanente de l’autoroute A-4. Je m’emploie à essayer d’en obtenir le financement, car dans cette commune encaissée c’est un vrai problème. »

L’intercommunalité, son état actuel, les relations intercommunautaires, l’avenir des territoires tout cela est sur le bureau des maires et de leurs délégués. Un projet de loi à venir baptisé « engagement et proximité » serait susceptible de répondre à certains problèmes majeurs qui se posent. « En particulier quand cela ne va pas dans un territoire constitué, le texte permettrait de proposer des solutions pour séparer en sous-entités un territoire où les chose se passent mal. Tout en respectant les seuils constitutifs desdites communautés nouvelles » rapporte le Sénateur. De manière plus générale, Jean-Marie Mizzon traduit transmets le message de ses mandats : « Il faut arrêter avec les réformes territoriales. Les gens veulent un arrêt, car il y a trop de décisions souvent prises de façon hâtives. Avec les difficultés actuelles et à venir, l’état d’esprit n’est pas prêt d’accepter de nouveaux changements. Moi, il me semble qu’il conviendrait d’imaginer deux périmètres : celui correspondant par exemple à celui du Schéma de cohérence territorial (Scot) pour les affaires stratégiques et un autre étage pour gérer le quotidien. Je tiens beaucoup à ce côté proximité, mais dans tous les cas de figure, il faut tenir compte de l’avis des maires ». De toute évidence au cours des dernières années, cette résolution de bon sens a plutôt été ignorée et les réformes ont été menées à la hache ! La constitution de la Région Grand-est, en particulier, mettant en évidence que « l’excellence n’a pas de taille toute tracée et le très grand n’est pas nécessairement le plus performant ». L’actuel débat à propos de la création de l’écotaxe en Alsace traduisant bien la profondeur et la réalité du mal. Attention, en mars prochain ont lieu les municipales et dans la foulée l’élection des nouveaux gouvernants des intercommunalités. Avec de tels boulets dans l’escarcelle, l’aventure risque de tourner à l’aigre et ceci sans parler de l’humeur des contribuables otages de toutes ces manœuvres. Messieurs : les contribuables sont aussi les électeurs.

M.G.

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